A Literary Tour de France
23. Lair to the STN, November 11, 1778

Messieurs de la Société                                                                          Blois, le 11 novembre 1778

typographique

 Messieurs

            Ci-inclus ce billet de Blau et cent quatre-vingt livres 21/31 mars prochain au domicile de M. [Salmon], marchand de vin, [Butte St. Roch] à Paris, dont procurerez paiement pour en décharger d’autant mon compte. Cette somme jointe aux petites erreurs qui se trouvent dans le vôtre me mettra à peu près en paix avec votre maison qui à ce moyen sera moins inquiète sur mes facultés. Ne regarderez-vous pas comme erreur la lettre de M. Linguet au roi dont vous m’avez envoyé tant d’exemplaires sans ordres qui ne sont pas vendus. Ma commission sur le deuxième exemplaire de l’Encyclopédie placée pour votre compte et que vous ne me passez qu’en partie, n’en est-ce pas une autre, la reliure des 4 volumes de planches que vous [mettez] à L.3  chaque volume qu’on ne me passe qu’à 30 sou même prix des autres volumes, n’en est-ce pas encore une? Enfin plusieurs autres que je noterai dans le compte courant que je vous ferai passer étant de la même évidence, seront (je l’espère) également reconnues de vous. Si au surplus, je vous redois quelques un de plus rien de plus, juste que de vous en tenir compte, je m’en entendrai avec M. Malherbe Lain de Loudun, votre ami et le mien qui vous en bonifiera ce qui vous évitera et à moi le désagrément des soupçons que vos dernières lettres semblent m’annoncer.

            Loin de vous marquer de l’honneur en vous payant, recevez au contraire mes remerciements et ma peine de ne vous avoir pas satisfait plus tôt. Je me suis trouvé gêné par le défaut de plusieurs récoltes et des pertes que j’ai essuyées. Je les ai supportées seul, sans la moindre intention de les partager avec personne. J’aurais désiré vous remettre un effet plus prompt. Il fait cependant partie du premier terme pris avec le commissionaire à qui j’ai vendu mes vins, j’en ai de beaucoup plus long, je lui en ai pourtant vendu pour une somme honnête. Mais si on vend au comptant, on donne à bien plus bas prix. La récolte a été bonne, le vin est cher, j’ai perdu gros pour avoir vendu des premiers.

J’ai eu le plaisir de voir le 7 courant au soir, M. votre commissionnaire. Je voulais lui remettre l’effet inclus s’il eut voulu attendre au lendemain matin. Il me dit que vous l’envoyez par la poste, vous le recevriez avant son arrivée, étant pressé de se rendre. Il partit de grand matin. J’ai été enchanté de causer avec lui, je lui ai donné l’adresse d’un commissionaire d’Orléans, chez lequel vous pouvez faire avec confiance vos dépôts, plutôt que de vous [fier] au caprice de leur Chambre syndicale, contre laquelle vous ne sauriez trop vous mettre en garde. Du dépôt il pourrait repartir à vos amis d’Orléans et d’ailleurs, les articles que vous destinez à chacun, ne pourriez-vous pas éviter la Chambre syndicale de Lyon? M. Duplain, votre associé et votre ami, aura -t-il toujours assez d’ascendant à cette chambre pour obtenir d’elle le libre cours de votre librairie? Si vous aviez un commissionaire zélé, intelligent et droit à Roanne, la lui adressez directement, il l’enverrait par la Loire, jusqu’à Nantes à leurs destinations, vos amis des rives de ce fleuve les feraient passer à vos [commettants el--] de ces bords, ce qui leur éviterait ou à vous plus de moitié des frais. Car permettez-moi de vous dire qu’ils sont exorbitants par les routes où vous m’avez fait vos envois. Un ballot passant par Besançon coûte L. 10 plus qu’un autre de même poids que j’ai reçu de vous par une autre voie, ce qui n’est pas juste que j’en supporte dès que c’est vous qui faites choix du commissionaire. Ce même-là adressa à un commissionaire d’Orléans qui me fit payer cents sols plus cher qu’un dernier ballot qui pesait 5 [Lb] de moins.

            J’ignorais que l’Encyclopédie de Pellet s’imprimât chez vous et que vous y fussiez intéressé. Je vous fais mon compliment de ce que vous êtes à votre huitième [mil] d’impression que je regarde comme vendu, puisque les lettres jointes au prospectus que M. votre commissionaire m’a remis, annoncent qu’il ne vous en reste plus que 300 exemplaires à placer. Je vous dirai avec la franchise que vous ne connaissez que si l’Encyclopédie de Lausanne en 36 volumes in 8º, dont j’ai vu le premier volume eut précédé celle de Pellet. Vous en auriez bien moins vendu par la différence de votre prix de L. 384  au sien qu’il réduit à L. 195, prix infiniment modique sur lequel la société de Lausanne ne peut gagner qu’en en plaçant aussi considérablement qu’ils en placent puisque M. [Witet], gendre de M. Fauche, leur associé m’a dit qu’il en avait vendu plus de 3000 dans le peu de provinces de la France qu’il n’a fait que traverser sans ceux qu’il espérait placer à Paris, où il s’est rendu en sortant d’ici le 14 septembre. À ce nombre, ajoutez-y ceux que plusieurs commissionaires auront placés en Italie, Naples, Venise, Hollande, Suède, Danemark, Allemagne, Pologne, Angleterre etc. Permettez que je vous fasse part de mes observations que j’ai cru devoir lui faire.

            Sur l’aveu qu’il me fit que Messieurs les rédacteurs de Lausanne avaient copié littéralementl’Encyclopédie de Paris, je lui en marquais mon étonnement en lui disant que celui d’Yverdon lui était de beaucoup préférable, que le premier foumillait de fautes et d’omissions, qu’un nombre infini d’articles excellents qu’il contenait ne l’en dédommageaient pas, que le plus important service qu’ils ont rendu aux lettres. C’était d’avoir remis les suppléments à leurs places, que s’en serait encore un bien plus grand de fondre dans l’ouvrage les six gros volumes du supplément d’Yverdon, que c’était le seul défaut que je lui connaissais, mais qu’il était grand! Celle de Liège qui me paraît n’avoir été qu’un projet aurait été admirable si elle eut été exécutée suivant le plan qu’ils m’ont envoyé. 36 volumes in folio ou 144 volumes in 8º avec plus de 3000 planches. Abandonner l’ordre alphabétique des mots pour suivre celle des matières était la vraie utile et l’intéressante encyclopédie qu’on ne peut [donner] trop tôt. Elle n’était pas chère, la remise aux libraires était honnête, ils avaient choisi ma maison pour leur entrepôt avec commisssion particulière.

            Votre Journal helvétique que je vois et que je continuerai de voir avec le même empressement m’apprend qu’on donnera au premier janvier prochain à Genève une [gazette] sous le titre d’ « Extrait des papiers publics de l’Europe. » 2 feuilles in 4º de chacune 8 pages par [semgine]  à L. 24 par an franc de port et que pour se la procurer on s’adressera à votre société ou à celle de Genève à la [taconnerie]. Je vous prie de m’inscrire au nombre de vos souscripteurs et de m’indiquer une maison à Paris où je puisse faire payer ma souscription. Le dix-neuvième supplément de la Gazette universelle de littérature que je tire m’annonce un ouvrage sous le titre de Mémorial de l’Europe, volume in 8º de 5 à 600 pages, projet qui, s’il a lieu, fera à peu près le pendant du vôtre, que pensez-vous de ce singulier ouvrage? L’annonce baroque qu’on en fait me fait douter de son exécution. S’il était suivi, je vous demande votre avis, chez qui peut-on souscrire et combien de volume par an sans augmenter le prix de mes souscripteurs. Je l’augmente annuellement (ma collection) de plusieurs articles lorsqu’il me vient de nouveaux abonnés de sorte qu’elle est aujourd’hui, une des plus complètes qu’il y ait bien loin. J’en ai le premier formé l’établissement ici.                

            Ayant communiqué votre dernier catalogue à plusieurs amateurs et devant le communiquer encore à d’autres quel terme accorderez-vous pour ce qu’on y a déjà marqué? Combien de volume de planches d’Yverdon ont suivi les 2 premiers volumes que j’en ai déjà ? Où en êtes-vous de votre Description des arts et métiers dont j’ai les quatre premiers volumes? J’aspire également à la progression des autres! A-t-on donné quelques suppléments à l’Histoire naturelle de M. Valmont de Bomare? Commentée si supérieurement par M. Bertrand?

            J’ai l’honneur d’être avec les sentiments de la plus vive reconnaissance

Messieurs                                                            Votre très humble et obéissant serviteur

                                                                        Lair

Date: 
Wed, 11/11/1778