Neuchâtel                                                                                                    

                                                                                  Montpellier, le 22 mai 1779

Messieurs,

Nous avons reçu successivement les deux dernières lettres que vous aviez eu la bonté de nous écrire, le 29 avril et le 9 mai.  Nous ne dirons rien touchant la première parce que le ballot dont elle nous annonce l'expédition ne nous est pas encore parvenu.

Quant à la seconde, nous aurons l'honneur de vous dire que nous ne croyons pas qu'une édition de la Liturgie protestante soit une entreprise fructueuse car outre qu'un pareil ouvrage a peu de débit dans nos cantons, nous connaissons une édition qui fut donnée il y à-peu-près 17 ou 18 ans sur le format in-octavo que quelques particuliers zélés firent publier[1] dans cette province et dont tous les exemplaires ne furent pas vendus.  Ces Sermons de M. le professeur Bertrand pourront avoir du débit mais ce ne sera pas dans notre ville ni dans les environs.  Il faut vous adresser pour cela à quelques libraires du côté des Cévennes.  Il nous reste à vous remercier des bonnes intentions que vous aviez pour nous et du désir que vous auriez de nous procurer des bonnes affaires mais elles que vous nous proposés ne sont pas de ce nombre.  En outre nous ne devons pas vous laisser ignorer qu'on met des entraves au commerce de la librairie de France et qu'il ne sera que très possible de faire pénétrer en France des livres imprimés dans le pays étranger.*  Nous avons l'honneur d'être avec toute la considération possible, Messieurs, vos très humbles et très obéissants serviteurs.

Rigaud Pons et comp.

*  Peut-être ce ne sera-t-il qu'un orage mais en attendant qu'il passe, il faut se mettre à l'abri.  Ainsi ne nous expédier rien, s'il vous plaît sans une commission expresse de notre part.