A Literary Tour de France
Malherbe to STN, 11 août 1784

 

                                                                                              Loudun, le 11 août 1784

 

Messieurs,

 

Que faire?  Si je n’obtiens pas la continuation de vos bontés, je reste dans le même embarras qu’il y a deux ans.  Tous mes soins—tout mon travail—n’ont pu me faire encore tirer le liard de mes malheureux crédits accrochés et retenus.  Je ne m’attendais pas à ces prolongations si funestes à mes affaires.  Les L.12200 existent dans le même état depuis 1779, dus par Avellan, Cader, et Math. [mot illisible] à Gignac.  Voilà au moins que j’ai remis une nouvelle procuration à Toulouse à M. Ginestet, fils aîné qui m’a promis des soins dans cette malheureuse affaire, se flattant pouvoir tirer quelque chose de M. Math. [mot illisible], ce qui m’est dû à Cadiz depuis 1774 et 1775 échu est toujours au même état.  Il y a passé 10 mille livres, portion dépendant du jugement à obtenir contre le comte de Elonard qui élude paiement de ses billets et le reste :  d’un autre jugement à requérir contre Vizarron sd., débiteur, qui refuse de reprendre l’assurance à recouvrir qu’il avait déléguée à M. La Chambre que les assureurs de Londres ne veulent pas payer, disant que l’on a chargé au lieu de [mot illisible], bien que [mot illisible], et Vizarron dit que c’est faux.  On l’appelle au justice pour qu’il reprenne sa délégation et qu’il se règle avec ses assureurs.  Les deux roués peuvent exister des années.  C’est du plus malheureux pour moi qui ai pris des engagements nouveaux que je ne pourrai satisfaire encore n’étant pas payé.  Un de mes débiteurs à l’Amérique m’a écrit qu’il paierait fin de cet an—moitié—et l’autre l’an prochain.  Si les revenus de son habitation ne manquaient pas.  J’ai là encore 4 mille livres.  Pour autres 4 mille livres [mot illisible] par un autre—au Port au prince—et 6 à L.700 à Cayenne.  M. Pellier de La Rochelle vient de confier mes papiers et procuration à un capitaine connu et affidé.  J’ai chez les libraires 5 à 6 mille livres [mot illisible] et plus de 8 à 10 aventurés.  Je reste avec tout mon bien [mot illisible] de feu mon père, consistant en 3 métairies et une maison en ville.  Je ne puis m’aider de ce bien fond, ne trouvant pas absolument à le vendre.  Quelques offres que j’en fasse, il n’existe nulle ressource dans ma petite ville.  Il n’y a aucun capitaliste.  J’aurais bien traité des peines et pertes si j’eusse pu vendre les domaines, qui me feraient à leur prix au moins 30 à 35 mille livres, trouvant leur valeur.  Je ne le puis—quel parti—prendre, Messieurs, je m’abandonne aux amis à qui je dois.  Ces raisons m’ont ôté tout pouvoir de retirer ma seconde promesse à votre ordre L.1069-17-0 échue ce 2e juillet.  Cela va vous courroucer.  Je ne puis l’impossible.  Je vous détaille mes moyens.  Je voudrais pouvoir les partager à chacun et me voir libéré.  Au moins je pourrai travailler avec quelque fruit quand je ne rentrais qu’avec 100 louis de tout avoir et comme je vis, mon existence est pénible s’il en fut et mon labeur sans succès.  J’ai encore de vos sortes anciennes pour 1000 à 1200 en nature qui s’écoulent peu à peu.  Je puis avoir 7 à 8 mille livres de librairie en fonds.  Je suis obligé de restreindre beaucoup mes assortiments, ce qui me fait changeur des débits.  Si je devenais plus crisé, je trouverais la manutention de 50 à 60 mille livres de livres à présent, ayant acquis assez de connaissances de bonnes pour écouler à ce temps-là. 

 

Je ne puis vous promettre, Messieurs, tant que je resterai dans cette situation, que la remise successive de quelques billets tels que je les recevrai de mes correspondants et aux termes qu’ils me prendront et ainsi éteindre peu à peu votre dû.  Daignez vous prêter à cette nécessité où si sur l’aspect de mon avoir vous avez quelque autre moyen à exiger, j’y acquiescerai pouvant le remplir.  Si je trouvais à traiter de quelques livres de France qui convinssent à vos débits, je tâcherais encore de m’en procurer.  Car, vu toutes ces retenues, il n’y a que dans la partie de librairie que j’ose me flatter pouvoir encore traiter à crédit. 

 

Je reste avec sincérité, Messieurs, votre très humble serviteur,

 

Malherbe, l’aîné 

Date: 
Wed, 08/11/1784