A Literary Tour de France
Malherbe to STN, 17 février 1778

                                                                                              Loudun, le 17 février 1778

Messieurs,

Depuis ma lettre 4 novembre je suis privé des vôtres, ce qui me surprend un peu.  J’aurais plutôt rompu le silence, sans l’attente, où j’étais de vos 2 balles facturées, l’une par Besançon en août passé, montant à L.282-12, MS n° 200.  Sans doute que vous aurez donné une autre destination à ce ballot, ayant su il y a peu par M. Couret de Villeneuve l’adresse de qui vous me l’annonciez qu’il n’avait rien reçu.  Je n’y compte plus et j’en déchargerai le crédit de votre compte.  Ce n’est que de la semaine passée que j’ai reçu [mots illisibles] la balle facturée 25 octobre, MS n°266 par adresse de MM. Claudet frères et fils de Lyon, montant suivant votre facture à…………….L.334-8

Rabais 5 pr. cent pesant..........................................................................17-8

                                                                                                         L.317 à vous remettre. 

Les voici, Messieurs, en ma promesse à votre ordre chez MM. Pache frères et cie. à Paris.  Par tout mars 1779, je vous en débite pour solde.  J’ai trouvé son contenu juste, sauf les imperfections.  S’il en trouve, je me réfère à ma dernière pour celles demandées.  Ne les oubliez pas, je vous prie, à première expédition, elles sont nécessaires pour placer plusieurs volumes.  J’ai trouvé quelques prospectus de l’Encyclopédie, 4° dans votre balle, mais pas assez pour en répandre chez toutes mes connaissances.  Vous pouvez statuer sur 3 exemplaires de cette Encyclopédie placés.  Rendez-moi raison de la remise que vous faites aux libraires.  Vous pourriez donc expédier les 3 exemplaires, c’est-à-dire ce qui sera prêt, quand vous voudrez et y joindre le 8e vol. des Arts et des catalogues prospectus etc.  Je n’ai pas été exempt de sources sur le port de votre balle quoiqu’il n’y ait rien de suspect.  Il faudra y renoncer jusqu’à voir.  Depuis les 6 arrêts rendus sur le chef de la librairie, on ne sait trop sur quoi statuer.  Je craignais quelque visite et qu’elle fût suivie de confiscation, soit par contrefaçons trouvées ou autrement. 

Heureusement il n’est arrivé aucun malheur.  Si les nouveaux règlements que portent les arrêts tiennent et sont mis sévèrement à exécution, le commerce de la librairie sera perdu en province, surtout si on asservit toutes les contrefaçons à l’estampillage qui est commencé à Rouen et qui y donne beaucoup d’embarras et y est fort coûteux aux gros magasins.  Il y a nombre de représentations faites en chancellerie savoir si elles seront exécutées.  On se flatte qu’il y aura bien des modifications sur les règlements qui ne peuvent guère tenir.  C’est fort à souhaiter.  Il doit s’établir à ne porte à Poitiers une nouvelle chambre syndicale.  Elle devait s’installer au moins de janvier.  Rien n’y est encore que je sache, statué.  Si on y établit des inspecteurs pour visiter, il faudra bien se tenir en garde à se trouver Nantes de livres suspects, soit galants, soit philosophiques, soit contre le gouvernement et de contrefaçons postérieures aux arrêts.  Depuis qu’on a reçu votre balle à Orléans avec 3 autres qui me venaient, on m’annonce qu’il a été affiché des placards au coin des rues, passant obligation à tous usuriers chargés de ballots de libri, de les porter à la chambre des libraires pour y être visités.  Si vous me faites passer à la suite quelque chose de Lyon, pour suivre à Orléans, il faudra expédier les balles sous le nom de Merane, afin qu’elles ne soient pas assujetties à être passées à la chambre qui pourra être rigide d’abord au moyen de la chambre syndicale qui sera à Poitiers qui pourrait me tracasser n’ayant aucun titre de libraire quoique je ne vende rien au particulier.  Je fais solliciter à Paris une permission en chancellerie qui m’autorise à continuer mon dépôt.  Si je l’obtiens comme on me le fait espérer, je serai à l’abri de la mauvaise humeur des libraires voisins.  Il n’y en a pas ici et je n’aurai plus qu’à éviter de ne pas tenir chez moi ce qui est suspect ou défendu. 

Il faut laisser faire pour les livres philosophiques.  Prudence vaut mieux que témérité dans les affaires.  Si ces nouveaux règlements ne sont pas exercés dans toute la rigidité d’abord appréhendée, et que j’obtienne la permission que je fais requérir, je serai à lieu d’étendre mon débit. 

Pourriez-vous me procurer le moyen de savoir à qui m’adresser pour vos dentelles des montagnes qui valent de M. Satz à 20 la pièce et pour vos thés suisses.  Aussi pour avoir montres en or et argent bien finies, bien réglées, à prix juste et modéré et à 10 mois ou l’an qu’on puisse faire expédier par la poste comme fait une maison de Ferney, mais elle envoie trop de commun.  Il faudrait du bon et à prix modéré.  J’en ferais placer vers 2 à 3 douzaines par an. 

Si vous pouvez expédier le 3e vol. des Arts, mettez-y 14 pour 12 de vos Bibles, nouvelle édition.  Leur prix est cher.  Modérez-le au possible.  J’ai bien reçu la lettre de M. de Salis.  La créance que j’ai dans ce pays-là ne se termine pas souvent.  Il faut attendre la mort de la mère du sieur Endrely qu’on a fait renfermer pour mettre ordre à ses dissipations.  Si votre Histoire philosophique, 8°, figs., annoncée n’est pas trop chère, j’en prendrais quelques exemplaires, ainsi que de la brochure Conversation du comte de Falkenstein avec Louis XVI, de votre Histoire de l’Amérique par Robertson. 

Mon billet de 700 n’a pas été présenté le jour de son échéance chez M. Barré, à présent rue comtesse d’Artois.  Il l’attendait. 

Toujours désireux de vous être utile, croyez-moi, Messieurs, entièrement dévoué à vous obliger et à vous convaincre que je suis avec attachement, sincérité, et estime, votre très humble serviteur,

Malherbe, l’aîné 

Je vous prie de faire dire à M. A. Senn que l’acquit à caution du dernier envoi peaux blanches m’a été remis de Dijon par MM. veuve Rameau et fils à qui on l’avait passé de la frontière.  J’attends de M. Senn le petit solde qu’il me doit.  On me fait offre de chevreaux blancs à L.78 le cent, à 3-4 mois. 

Date: 
Tue, 02/17/1778