A Literary Tour de France
Malherbe to STN, 4 septembre 1773

 

                                                                                              Loudun 4 septembre 1773

 

Messieurs,

 

Quand je vous ai demandé quelques-uns de vos articles, j’entendais vous les payer à vos termes ordinaires et non d’avance.  Ainsi, depuis le 28 jeudi que j’ai reçu facture de votre envoi, j’ai lieu de croire, ne m’étant pas parvenu encore, qu’il vienne, ainsi votre surprise au sujet de ma traite sur vous doit cesser, et je vous avoue que le protêt qui en sera fait ne me satisfera pas.  C’est un déboursé commencé depuis près de 18 mois à 2 ans.  Je ne vous demande rien pour ma peine, si vous ne le voulez pas, mais je pensais que vous n’iriez pas contre l’acquit de cette somme, me sachant de plus en débours de L.166 à votre occasion depuis plusieurs mois.  Quoique vous réitériez que ce paiement regarde M. Malassis, puis-je l’acheminer, je n’avais d’autre voie exhibant vos lettres et le refus de ce libraire qu’à requérir la vente de la marchandise pour me payer.  Je ne l’ai pas fait et reste dans l’attente en vue de vous obliger.  Vous pouviez donc en revanche mériter refus de paiement à ma traite.  Vous m’aviez promis sur les envois que vous feriez par mon entremise une commission de 2 pr. %.  Si ces envois ne vous ont pas fructifiés, ce n’est pas ma faute.  Tout ce que je puis, c’est de vous délaisser cette commission promise sur ceux qui vous tournent en perte.  Il fallait convenir aux faits sans restriction avec vos correspondants avant que de lâcher vos envois.  Tant que vous ne trouverez pas jour à éviter l’impôt de 28 pr. % ou à l’amoindrir et à vous procurer une voie d’introduction non-risquable, vos relations en France seront toujours ingrates et peu profitables.  J’en suis fâché.  Je n’ai rien négligé et ne néglige rien pour coopérer à vous procurer bonnes affaires, mais les obstacles multipliés dégoûtent, rebutent.  C’est ce que m’écrivait M. Pavie de La Rochelle il y a peu et il en  paraissait fâché pour éviter discussion.  Au cas que le ballot dont vous me promettez encore la réception me vienne, je n’entends point payer les frais de voiture à Chalon et de rétrograde, mais lui direct, car tous les frais accumulés doubleraient le prix de la marchandise et nul moyen après de la vendre.  C’est ce que M. Lair craint pour son ballot dont il n’a aucune nouvelle, ce qui le rebute presque de l’accepter.  Vous sentez que ces longueurs ne sont pas gracieuses.  Je ne sais rien encore de ce ballot qu’il chemine par Lyon.  Je souhaite que votre discussion avec M. Malassis se termine à l’amiable.  J’attendrai encore la réponse que vous espérez de Nantes sur l’envoi de vos pièces de conviction.  Si M. Malassis prend la marchandise, il me paiera sans doute.  Une autre fois je ne serai certainement pas si complaisant.  Il ne faut faire d’envoi que bien d’accord sur les conditions et vous serez exempts de discussions fâcheuses.  Je pourrais voir M. Chevrier sous peu comptant passer à Poitiers. 

 

L’impôt est une charge bien forte et qui augmente fort la marchandise.  Si vous pouviez l’éviter ou l’amoindrir par quelque voie détournée et une assurance de 10 à 12 pour cent on s’y rangerait encore. 

 

Il faut ne m’envoyer les Bibles que par voie sûre.  J’en ai reçu de celles in-8°—50 qui n’ont fait que L.30 de frais de voiture, ce qui n’est pas exorbitant.  Je les ai reçues par Lyon. 

 

Si mes petites affaires n’exigeaient pas tous les petits fonds que j’ai, je ne vous réitérerais pas expressément de presser que M. Malassis me rembourse, et il me ferait moins de peine que vous referiez l’acquit de ma traite, ce qui ne me sera pas favorable aux yeux de mon ami de Paris à qui je n’ai rien expliqué. 

 

J’ai l’honneur d’être avec estime et sincèrement, Messieurs, votre très humble serviteur,

 

Malherbe, l’aîné 

 

Si M. Haldiman est toujours chez MM. De Luze, je vous prie de lui dire que j’attends de ses nouvelles depuis longtemps.  Je souhaite qu’il soit bien portant. 

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Date: 
Sat, 09/04/1773