A Literary Tour de France
Malherbe to STN, 6 juin 1781

 

                                                                                              Loudun 6 juin 1781

 

Messieurs,

 

Ma lettre du 15 mai vous présente ma situation dans la plus haute vérité.  Il m’était important d’y recevoir réponse hier soir que cela se pouvait.  J’en suis privé et je ne sais trop quel parti prendre.  Je ne puis absolument vous donner de satisfaction en comptant ou espèces pour le billet 1318 comme vous le souhaitez.  Voilà votre retraite ès mains d’un huissier.  Si vos ordres sont donnés avec autant de [mot illisible] qu’on montre d’ardeur à les exécuter, on peut me perdre, et ce n’est l’intérêt de personne de me faire succomber par un traitement aussi rigoureux.  Si c’est cependant votre volonté, Messieurs, je ne vois aucun moyen, aussi prochain qu’on l’exige, de pouvoir vous faire cette somme.  Je vous ai offert des sûretés.  Je vous ai remis le tableau de ce que j’ai et possède.  Pourquoi me le faire manger en frais et me mettre dans un discrédit à ne pouvoir m’en relever ?  Je ne tends point à accepter votre confiance malgré vous.  Si vous me la continuez que ce soit de bon gré.  Mon application sera uniquement dévouée à la mériter, mais je ne veux pas de reproches.  Si vous répugnez aux délais que la nécessité m’oblige à réclamer, ne laissez aucun trouble sur votre tranquillité, craignant de perdre.  Je vous offre de vous ressaisir de votre marchandise.  Si j’ai essuyé des pertes, s’il m’est dû de gros fonds, je puis encore sortir d’avec vous pour que vous y participiez.  L’objet qui a occasionné ce billet 1318 échu et celui à échoir en décembre, je l’ai encore au 2/3.  Reprenez ce qui me reste si vous croyez qu’accédant aux délais requis de vous payer en 3 à 4 ans met vos intérêts en risques.  Ce que j’ai reçu de vous dernièrement reste en nature et à vos ordres.  Dans ce qui me reste d’ancien, il y a encore divers articles de vous qui pourront remplacer le [mot illisible] du 1/3 peut-être débité de votre partie de livres philosophiques que j’aurais bien fait de ne pas accepter.  Vous n’auriez pas peut-être la peine de me faire de suites aussi rigoureuses qu’on m’en mendie.  C’est le premier délai que je vous demande.  [Je] suppose que vous ayez de toute rigueur, que la sentence déjà prononcée, et qui va peut-être être signifiée fort mise en exercice, que l’on saisisse vos marchandises, qu’en cette rigueur j’offrirais, ne faut-il pas mieux, me les laisser.  Écouler, ni les reprendre. 

 

J’ai encore écrit dix lettres pour offrir aliénation de domaines ou vente à réméré de 2 métairies qui valent au plus bas mot d’à présent 18 à 20 mille livres, pour 10 à 12 mille livres qui me suffiraient pour satisfaire au plus pressant.  Si je réussis dans cette négociation, je paierai les L.1318 mais je n’ai nul moyen de les trouver subito par aucune autre voie.  12 mille livres que j’ai à Cadiz ne se paieront peut-être qu’à la paix ou peut-être quelque portion à l’arrivée de la flotte de leurs Indes de relâche à la Havane et attendue.  S’il était possible de vous [mot illisible] domaines je suis prêt à vous satisfaire. 

 

Déterminez-vous, Messieurs, à un parti amiable puisque je n’oppose rien à votre satisfaction.  Je dois supposer que vous ne méditez pas ma perte en ordonnant tant de rigueur dans vos suites.  J’ai écrit à M. Battilliot que je vous avais écrit et fait des propositions.  Je ne sais pas s’il me répondra.  En attendant celui de Poitiers qui a [mot illisible] de M. Battilliot sa retraite, pousse à rigueur l’huissier d’ici.  Voilà d’apparence L.30 de frais si la sentence se signifie.  Il est cruel d’être assiégé ainsi de tribulations quand on a toute bonne volonté.  Je ne sais cependant me plaindre de ceux à qui j’ai demandé délais.  On y a acquiescé sans me menacer de frais.  Ce que je vous propose s’exécutera sans contrainte pour [mots illisibles] en frais.  Une maison d’Avignon, M. Fauche chez vous à qui je dois et qui ont accédé à mes propositions, en offrant bien nouvelles marchandises aux termes accoutumés.  On ne croit donc pas tout perdre plus des 2/3 de ce que je dois est toujours représenté par le domaine que j’ai eu il y a 3 ans de mon père estimé alors vers 44 mille livres par arbitres et par acte notarié mis à 30 en ménagement des droits de contrôle.  J’espère [mot illisible] ma mère 12 à 15 mille livres.  Je dois au total dans la masse de mes affaires 50 mille livres même un peu moins à présent.  Vous avez le tout de ce qui m’est dû par ma circulaire et des marchandises restantes. 

 

Je crois que cette vue peut vous laisser en une sorte de tranquillité, à défaut.  Si vous craignez mauvaise affaire, je vous offre de vous ressaisir de vos objets.  J’espère que vous préférerez un tel parti à celui de rigueur.  Daignez me rendre raison et me croire en sincérité, Messieurs, votre très humble serviteur,


Malherbe, l’aîné  

Date: 
Wed, 06/06/1781
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